8 Avril 2010
Par Freddy Mulongo, jeudi 8 avril 2010
Le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan hausse le ton contre « les provocations » de l'État hébreu. Il a été reçu mercredi 7 avril 2010 à l'Élysée pour un déjeuner de travail.
Le ton monte entre la Turquie et Israël. Alors que la visite à Paris du premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, devait replacer sous les projecteurs les tensions entre Paris et Ankara à propos de l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne (UE), celles-ci ont été éclipsées par des échanges très vifs entre les gouvernements turc et israélien, qui ponctuent des mois de détérioration des relations entre les deux pays.
Face à la presse, avant un déjeuner de travail avec Nicolas Sarkozy à l'Élysée, M. Erdogan a accusé Israël d'être «la principale menace contre la paix» au Proche-Orient. «Si un pays fait usage d'une force disproportionnée en Palestine, utilise des bombes au phosphore à Gaza, nous n'allons pas lui dire: «Vous avez bien fait, bravo», a déclaré le chef du gouvernement turc.
Il y a eu une attaque à Gaza qui a fait 1 500 morts (fin 2008, NDLR) et les motifs invoqués sont des mensonges. Lisez le rapport Goldstone. Goldstone est juif et son rapport est clair, a poursuivi M. Erdogan, chef du parti islamo-conservateur AKP. S'il dérange Israël, c'est parce qu'il décrit des réalités.
Israël mène une politique d'invasion et de provocations permanentes. Ce n'est pas parce que nous sommes musulmans que nous le disons : notre approche est humanitaire.» Il a également justifié son opposition à des sanctions contre l'Iran par le fait qu'Israël, réputé posséder l'arme nucléaire, ne subit aucune pression.
Ces flèches font écho aux critiques entendues à Jérusalem. Mercredi, le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a déploré «les attaques répétées» de son homologue turc. La veille, son ministre des Affaires étrangères, l'ultranationaliste Avigdor Lieberman, avait accusé Recep Tayyip Erdogan de mettre à mal des décennies d'«excellentes» relations entre Israël et la Turquie - liés par un accord de coopération militaire depuis 1996 -, estimant que le dirigeant turc «était lentement en train de se transformer en Kadhafi ou Hugo Chavez», les présidents libyen et vénézuélien.
«Le problème, ce n'est pas la Turquie, c'est Erdogan, a insisté Lieberman. Il cherche à se rapprocher du monde musulman sur notre dos. Je ne l'ai pas entendu réagir aux attentats meurtriers perpétrés par des musulmans au Pakistan ou en Irak.» Ankara a aussitôt «rejeté et condamné avec force ( ces) déclarations sans fondement, déplorables et dépassant les limites, (qui) montrent que M.Lieberman continue de faire fi des règles de la diplomatie.»
Apprendre à se connaître
Par comparaison, le ton est resté parfaitement «diplomatique» entre les dirigeants turcs et français, malgré leurs désaccords. Tout en déplorant que son pays, candidat à l'UE depuis 1959, fasse l'objet «d'un traitement appliqué à aucun autre», le premier ministre a affiché «une détermination intacte» et s'est dit «persuadé» que l'opposition de la France et de l'Allemagne à l'adhésion d'Ankara «ne resterait pas figée indéfiniment.
Au fil du processus (de négociations) , il y aura une évolution et je suis convaincu que M.Sarkozy va réviser son approche.» Le président français a accepté l'invitation de M.Erdogan à se rendre en Turquie d'ici à la fin de l'année, «rapidement après le début de la présidence française du G20» en novembre, a indiqué mercredi l'Élysée.