Dans le lot des observateurs nationaux et internationaux qui se sont déployés sur toute l’étendue du territoire togolais pour la couverture de la présidentielle du 04 mars, il y avait aussi ceux de
l’Eglise catholique togolaise. Ces scrutateurs ont acté au nom de l’Eglise de Dieu du Togo sous la bannière de la Cenjp (Mission d’observation de la Commission épiscopale nationale justice et
paix).
Conférence des Évêques du Togo pour la présidentielle (ph : archives diocèse de Kpalimé).
Depuis la publication par la Cenjp d’un communiqué laconique sur la joute électorale quelques jours après sa tenue, silence radio au niveau de l’Eglise catholique du Togo ! Aucun signe d’un
rapport général et définitif. Les catholiques togolais sont-ils dorénavant complices de la "fraude électorale" ?
Le déploiement des observateurs de la Cenjp avait paru aux yeux de la majorité des Togolais comme un gage de plus pour l’organisation d’une élection présidentielle crédible, « à la ghanéenne »,
comme l’a souhaité le président sortant lui-même, Faure Gnassingbé.
Mais, ces Togolais amoureux de la démocratie ont fini par déchanter. « Je me suis donnée corps et âme le 04 mars 2010 pour suivre de près les opérations électorales dans le cadre de la tâche
assignée à la Cenjp.
Aujourd'hui, je suis hyper déçue que cette structure catholique n’ait pas non seulement rendu public son rapport global et définitif sur le scrutin du 04 mars 2010, mais aussi n’ait pas réussi
à recenser, ne serait-ce qu’un minimum d’imperfections qui ont marqué l’avant et le pendant scrutin du 04 mars 2010. Quelle honte !!! C’est ce que l’Eglise catholique veut enseigner comme
justice au monde ? Je n’en reviens pas… », commente, exaspérée, une étudiante togolaise.
En effet, la Cenjp ne s’est réellement fendue que d’un communiqué après la consultation présidentielle de début mars. On pouvait y lire entre autres : « La Cenjp se félicite du travail de ses
membres nationaux et internationaux déployés sur les sept diocèses du Togo. Cette Mission a pu constater le bon déroulement du scrutin dans son ensemble.
D’une manière générale, les élections ont eu lieu dans le calme et dans le respect des règles édictées par le Code électoral en vigueur ».
Une auto-félicitation en quelque sorte, avant de relever des anomalies bénignes, qu’a priori, même de simples citoyens attentifs pouvaient énumérer :« Cependant, la Cenjp est surprise par les
déclarations unilatérales et prématurées de certains partis politiques avant la proclamation de la Commission électorale nationale. Ces déclarations intempestives contredisent l’esprit
démocratique qui aurait dû prévaloir.
La Mission d’observation craint que la population togolaise ne soit influencée voire instrumentalisée à des fins partisanes et que ces déclarations hâtives ne détruisent la confiance que le
processus engagé voulait instaurer.
La Cenjp espère et souhaite que l’issue du scrutin n’engendre point de violences et que le processus démocratique se poursuive dans le débat pacifique des différents partis politiques en vue
des prochaines échéances électorales », s’est défendue l’Eglise catholique du Togo… Un peu comme si une « élection crédible » équivaut, aux yeux des responsables de l’Eglise de Rome du Togo, à
« une élection sans violences » !
Quel type d’obnubilation ont au juste été victimes les observateurs de la Cenjp pour ne pas voir les nombreuses irrégularités énumérées par le Rapport préliminaire de la Moe (Mission
d’observation de l’Union européenne) ?
Qu’ont fait les responsables catholiques togolais du « 8ème Commandement de Dieu » qu’enseigne leur catéchisme et qui dit, « tu ne mentiras point » ?
« Nous avons pourtant indexé dans les comptes-rendus que nous avons remis au Cenjp un certain nombre de remarques, fruit de notre observation sur le terrain ! », s’alarme et s’étonne notre
interlocutrice précitée qui estime ne plus avoir d’envie de scruter une élection pour le compte des catholiques au Togo.
On a l’impression, au demeurant, que l’Eglise romaine togolaise ne mesure pas l’enjeu de la présidentielle du 04 mars 2010 en se refusant à produire un Rapport détaillé et définitif sur son
observation électorale.
Cette attitude ne devrait pas étonner les Togolais les plus attentifs sur l’évolution de la marche de leur pays vers la démocratie. Déjà, en 2007, l’épiscopat local, à la faveur des
législatives, s’est tout juste félicité du climat dans lequel se sont tenues ces élections, sans prendre la peine de dénoncer les fraudes qui les ont émaillées.
De simples chrétiens peuvent jouer avec les vertus de la Vérité dans une société. Mais, que des hommes de Dieu qui se sont engagés devant l’Eternel à servir sa « Vérité et sa Lumière » se
rendent complices d’injustices flagrantes, a de quoi choquer. Messieurs les évêques du Togo, sachez que recommander la prière pour solutionner les maux d’un Etat est une très bonne chose.
Mais que ceux qui recommandent cette prière se complaisent dans un silence infâme envers les violations élémentaires des droits de l’Homme est d’une part une insulte à la Foi, à l’intelligence
humaine, et d’autre part à Dieu lui-même.
L’on a cru à un sursaut de l’épiscopat togolais quand la Cet (Conférence des évêques du Togo) a dénoncé dans un communiqué la descente illicite qu’ont effectuée des gendarmes, le 09 mars 2010, dans
le centre de compilation du l’Ufc (Union des forces de changement) des résultats du scrutin de début mars.
Après l’époque de la “complicité” de l’ancien archevêque du Togo, Mgr Casimir Dosseh-Anyron, vis-à-vis des crimes contre l’humanité que commettait le défunt Eyadèma Gnassingbé, la résistance
puis le ramollissement de Mgr Philippe Fanouko Kpodzro, l’épiscopat togolais va-t-il se contenter dorénavant de fermer les yeux sur les dérives autocratiques du régime de Faure Gnassingbé au «
nom de la préservation de la paix » ?
Mgr Ntumi du Cameroun, au secours ! L’actuel archevêque du Togo que vous avez intronisé en 2007 ne se préoccupe que de la foi de ses ouailles ; il n’a que faire de leur quotidien.
Ainsi se conçoit la « Vérité » au sein des catholiques au Togo.